Les témoignages du Congo
On nous avait averties, autant dans les cours de santé internationale que par des témoignages d’amis. Mais voir la maladie, la vraie, c’est autre chose. Les derniers jours, à faire la tournée avec les médecins et à assister les sages-femmes, ont été un peu plus difficiles…(…) Traiter la maladie, ce qui motive Dr Grâce, médecin ici à Bétou, et Dr Bingui, un médecin de TSF à Brazzaville. (…) Ils font tout ce qu’ils peuvent pour aider la population, mais il y a tout de même des histoires tristes. Ici, les femmes font souvent des avortements au premier trimestre et même en début de deuxième trimestre, à cause du paludisme. Ici, les femmes ont des ruptures prématurées des membranes pré termes, parce qu’elles n’ont pas de retrait préventif de la CSST et qu’elles continuent de travailler aux champs jusqu’à l’accouchement. Ici, un enfant prématuré de moins de 32 semaines a très peu de chances de survie. Pas parce que le personnel n’est pas motivé, bien au contraire. Par manque de matériel : un incubateur est fait avec des pagnes, pour garder la chaleur ; la photothérapie se fait avec les rayons UV du soleil ; la pression positive se fait manuellement, parce qu’il n’y a pas de CPAP pour les aider à respirer. Tous des moyens très ingénieux et débrouillards, mais insuffisants pour des trop petits bébés. Ici, il y a des cas de tuberculose chez des femmes immunosupprimées qui ignoraient leur statut de VIH à cause du tabou entourant ce diagnostic. Ici, des enfants meurent très jeunes de paludisme grave ou de malnutrition sévère. Les parents tardent à consulter comme dans notre cas de vendredi matin. Un enfant est venu trop tard et surtout très malade. Un paludisme compliqué d’une hémoglobine à 45, d’une forte fièvre, d’une malnutrition, et d’une pneumonie. Nous avons tenté la réanimation cardio-respiratoire, mais malheureusement nous n’avons pas réussi à sauver cet enfant. Ce fut une matinée riche en émotion puisque directement après nous avons dû réanimer un 2e bébé issu d’une césarienne, qui cette fois-ci, a survécu. Ce qui est beau cependant, c’est de voir la passion et la motivation des gens. Une femme ne peut pas se payer un test pour vérifier l’anémie ? Bon, on va s’arranger. Une autre n’a pas les moyens de se payer une transfusion (malgré une hémoglobine à 37…) ? Bon on va aller collecter au village d’où elle vient et trouver un donneur (ce qu’ils ont réussi à faire !!). Une césarienne à 2h du matin ? Tout le monde rentre avec le sourire et avec la joie d’entendre ce premier cri, le cri de l’espoir, le cri de la vie. Bref, ici les gens sont malades. Mais ils ont une équipe dévouée qui fait de son mieux pour les aider. Merci TSF d’appuyer cette équipe.
Installé dans une petite salle surchauffée de l’hôpital de base d’Impfondo, Dr Robert Gagnon n’aurait jamais pu se douter que le sujet de sa formation passerait aussi vite de la théorie à la pratique. En début de matinée, l’obstétricien-gynécologue qui pratique au Centre universitaire de santé McGill offre des conseils à Dr Cyr Christian Gouary Bikind, médecin assistant à la coordination pour le projet TSF, au sujet d’une femme enceinte. Ce dernier craint une grossesse abdominale. Suite à une échographie, Dr. Gagnon diagnostique plutôt un placenta praevia, une condition pouvant provoquer une hémorragie.
Drôle de hasard, les hémorragies chez les femmes enceintes sont justement le sujet de la formation matinale offerte au personnel médical de TSF. Dr. Gagnon vient d’ailleurs de mettre à l’écran la diapositive sur le placenta praevia lorsque Dr Bikind l’interrompt. La patiente vue plus tôt est en hémorragie. Une césarienne est nécessaire. Dre Renée Fournier, médecin de famille qui pratique à la Clinique de santé familiale Queen Élizabeth, prend le relais de la formation avec comme sujet l’allaitement maternel alors que Dr Gagnon et Dr Bikind se dirigent vers la salle d’opération rudimentaire pour aider à la naissance d’un prématuré. Le petit est amené dans une salle dénudée servant de pouponnière, où le personnel de TSF le prend en charge. L’enfant tombe cependant en hypothermie. Il faudrait un incubateur. Mais l’hôpital de base d’Impfondo n’a pas d’électricité, sauf une génératrice pour les cas urgents. Au quotidien, les femmes accouchent à la lueur de lampes fanales. Alors sans électricité, pas d’incubateur. Le nouveau-né est transféré de toute urgence dans un véhicule TSF-HCR vers l’hôpital évangélique d’Impfondo, qui a des incubateurs. Le petit est sauvé, tout comme la maman.
Cette fois, la vie a triomphé. Mais toutes les histoires ne se terminent pas aussi bien. Beaucoup de besoins restent à combler pour que les populations, locales comme réfugiées, puissent obtenir les soins de santé qu’elles méritent.
« Histoire à succès d’un patient diabétique de 55 ans, suivi dans les structures privées de Bétou mais qui a développé une complication. A la recherche des soins de qualité, il a consulté au CMS TSF où le diagnostic de pied diabétique au stade de nécrose a été posé. Après avoir réalisé un bilan d’extension et démarré la prise en charge selon le protocole en vigueur, le CMS TSF référa le patient dans un hôpital spécialisé où il fut traité et guéri. A son retour à Bétou, le patient est venu témoigner toute sa gratitude au staff médical de TSF. »
Le Centre Médico-Social (CMS) de TSF apporte un appui à l’Hôpital de référence de Bétou afin de désengorger l’hôpital en ce qui concerne les activités préventives telles que les soins prénataux et la planification familiale. Sur une période de 5 mois en 2023, le CMS TSF a réalisé 2135 consultations réparties en 1178 femmes et 957 hommes parmi lesquels 758 réfugiés. Le CMS de TSF à Bétou a contribué à la réduction des évacuations sanitaires vers les hôpitaux secondaires et tertiaires d’Impfondo et de Ouesso situés respectivement à 234 km et 450 km de Bétou. Ceci a contribué à l’amélioration de l’état de santé et du bien-être des populations de Bétou et des environs.
Bref, le CMS… est une ressource essentielle à Bétou pour une population en santé !
L’avenir, c’est celui des jumeaux de Naweji Bamubila et de son mari, nés après leurs quatre frères et soeurs, et aujourd’hui sains et saufs grâce à la qualité des soins dispensés par TSF en République du Congo. À la naissance, le faible poids des bébés inquiète les médecins et l’un d’eux tombe gravement malade. TSF a fourni une assistance nutritionnelle et des médicaments, en plus de prendre en charge les analyses biomédicales et les coûts d’hospitalisation.
Je m’appelle MIAYOUKOU Blody. Je suis sage-femme à Terre Sans Frontières et responsable des sages-femmes à Bétou. Je suis ici depuis 2015. On s’occupe des femmes enceintes, et des femmes allaitantes. On fait de la sensibilisation dans les centres de santé de Bétou et les sites de réfugiés. On parle des thèmes qui sont appropriés aux femmes enceintes et allaitantes par rapport aux réalités et aux difficultés sur le terrain.
On travaille ensemble ! Comme on dit, j’ai choisi ce métier, j’aime ce métier, je veux aussi sauver la vie des femmes, la vie des mamans, des enfants donc une femme qui vient accoucher doit repartir avec le sourire ! »