Deux physiothérapeutes au Sénégal

Anik Bélanger et Myriam Gauvin, deux physiothérapeuthes, témoignent de leur expérience de trois semaines au Sénégal à titre de coopérantes volontaires.

Semaine 1
Voilà que nous venons de terminer notre première semaine ici au Sénégal ! Ouff.. tant de belles expériences en si peu de temps ! Anik et moi sommes plus que chanceuses de pouvoir vivre ces moments si précieux. Chaque jour est une nouvelle aventure et nous profitons de chaque seconde en terre sénégalaise. Une des choses qui nous surprend ici est la bonté sans mesure des habitants que nous croisons. Partout, les gens prennent le temps de venir nous saluer et nous serrer la main, du plus jeune au plus vieux. Ces salutations sont toujours accompagnées d’un magnifique sourire qui éclaire si bien leur visage. Nous n’avons jamais reçu autant d’amour que depuis que nous avons déposé les pieds ici et nous en sommes très reconnaissantes. Il n’y a pas seulement le soleil du Sénégal qui est chaud, mais bien le cœur des habitants. Nous nous sentons les bienvenues.

De Dakar à Mbar en passant par Ndiaganiao, il est très difficile de passer inaperçue. Notre peau blanche en fait réagir plus d’un. Ici, nous sommes surnommées les «toubabs» qui signifie blanche en Wolof. C’est magique de voir les enfants nous regarder avec les yeux brillants d’émerveillement. On se fait scruter de la tête aux pieds et on s’y plait bien.

En seulement quelques jours, nous avons déjà vécu plusieurs belles rencontres et moments touchants. Et oui, nous avons déjà pleuré de joie. Que ce soit notre passage dans un mariage Sénégalais, une partie de soccer improvisée avec des jeunes enfants dans une ruelle, la naissance d’un enfant ou bien lorsque des jeunes adolescentes chantent pour nous, ces moments resteront gravés dans notre mémoire pour toujours.

Comme dans toute chose, il est difficile de changer des habitudes déjà bien établies. Ceci dit, nous travaillons fort pour faire comprendre le but de notre mandat ici au Sénégal. Dans les postes de santé, nous encourageons le plus possible les professionnels avec qui nous travaillons, d’ajouter des nouvelles techniques à leurs pratiques vis à vis des cas de lombalgies et/ou de dysfonctions du plancher pelvien. Dans le poste de Santé de Ndiaganiao, nous avons effectué une formation clinique de base concernant l’évaluation du plancher pelvien. Nous avons aussi remis à la sage femme un aide mémoire à afficher au mur pour se souvenir des éléments clés. Nous encourageons à prévenir au lieu de guérir.
Nous préparons activement la formation de trois jours que nous donnerons d’ici peu à Kaolack. Nous sommes convaincues que notre venue peut faire une différence !

Semaine 2
Une deuxième semaine chargée d’activités en terre sénégalaise. Nous réalisons de plus en plus les différences culturelles entre nos deux pays. 

En début de semaine, nous prenons la route pour Kongheul, le 2e poste de santé que nous desservirons. Nous sommes accueillies par des sœurs très dynamiques et un médecin italien qui séjourne avec nous pendant la semaine. Le matin, nous devons faire 16 km dans la brousse pour arriver au poste de santé de Kombidia où la sage-femme loge 7 jours/7 pour assister les accouchements. Les salles d’accouchement me frappent toujours autant, un lit simple avec des étriers, une salle de bain et une table chauffante pour le nouveau-né. Pas de monitoring, de soluté, d’échographie et pas d’ambulance à disposition en cas d’urgence. Nous apprenons qu’il n’est pas rare de compter le nombre de grossesses menées à terme versus le nombre d’enfants vivants…

Les enfants nous regardent à travers la clôture pendant notre journée de travail et à leur retour de l’école vers 16h nous sortons jouer avec eux. Je suis sur le terrain de foot avec les garçons et Myriam est sur la piste de danse avec les filles. Quelle belle façon de terminer nos journées de travail. Nous décidons de leur acheter un ballon de soccer la 3e journée et des garçons de tout âge se joignent à nous pour la partie. À peine 30 minutes plus tard dans le sable, la roche et les déchets, le ballon est percé. Nous partons à la recherche d’un homme dans sa case qui répare fièrement notre précieux à l’aide de colle, de sable et de plastique. Les enfants n’y voient que du feu. 

Ayant peu de patientes l’après-midi, nous en profitons pour travailler avec la sage-femme pour faire de l’enseignement et de la pratique. Elle est curieuse et pose beaucoup de questions. Nous nous déplaçons également du côté des consultations générales où nous pouvons intervenir sur quelques cas musculo-squelettiques conjointement avec le médecin. La population sénégalaise est très jeune. Les enfants sont atteints principalement de dermatose, de malnutrition et d’infections variées.
 
Nous sommes frappées de voir le niveau d’autonomie et de solidarité des enfants du Sénégal. Ayant des familles volumineuses, les frères et sœurs sont appelées à réaliser diverses tâches telles que puiser l’eau, s’occuper des enfants cadets, porter des objets au village, assister à la messe seuls et j’en passe. Le respect des aînés est évident ici. Personne ne parle, pleure ou ne crie à la messe. Une jeune fille de 7 ans traîne son frère d’un an dans son dos. Différentes réalités. 

Nous terminons la semaine à Kaolack où nous donnons la formation sur les lombalgies et la rééducation périnéale chez les femmes. Pendant la fin de semaine, nous enseignons à 18 infirmiers/infirmières et sages-femmes comment évaluer la force et les tensions du plancher pelvien et son influence sur l’incontinence, la grossesse et les lombalgies. Nous tentons également de démystifier quelques pathologies lombaires fréquemment rencontrées et leurs principaux traitements. Pendant la 3e journée, nous sommes fières de constater que les participants ont retenu l’essentiel lors des mises en situation. Tout le monde quitte le sourire aux lèvres avec le sentiment du devoir accompli, nous incluant, deux jeunes physiothérapeutes se découvrant tranquillement une passion pour l’enseignement. 
Pour notre dernière semaine, je nous souhaite d’être aussi proche des gens, des réflexions avec le personnel soignant, des apprentissages communs et l’impression de quitter un monde unique, mais ô combien accueillant.

Semaine 3
Durant la 3e semaine, nous avons assuré des suivis avec les sages-femmes précédemment formées l’an dernier à Dakar. Nous avons principalement fait du rappel sur les notions de constipation, d’incontinence et de douleurs sexuelles et l’impact bénéfique de la physiothérapie pour ces problèmes. Avec la pratique, nous sommes devenues plus efficaces et rapides dans notre enseignement et le temps de consultation n’était presque pas augmenté. Les sages-femmes rencontrées étaient contentes d’avoir ce rappel, car plusieurs notions ne sont pas encore intégrées. Tout changement à nos méthodes de travail prend du temps, c’est bien normal.

Nous avons logé avec les sœurs de Dakar et nous avons découvert un côté bien dynamique à la vie en communauté. En dehors du cadre de travail, nous avons eu bien du plaisir et des fous rires avec ces femmes exceptionnelles. Myriam et moi nous rappellerons toujours du rire particulier d’une sœur qui nous fait sourire à tout coup. Elles nous ont partagé leur spiritualité tout en nous laissant libre de vivre la nôtre. Elles ont pris soin de nous comme des mères. Nous gardons des souvenirs heureux de ces rencontres.

Pour notre dernière soirée au Sénégal, nous avons partagé un souper communautaire autour d’un bol avec 10 personnes. Ici, manger ensemble est signe de rapprochement et de partage. Nous enfilons des tenues traditionnelles et nous sortons assister à des événements culturels de musique et de danse Cerer. La danse au son des tamtams commence par un tempo lent, puis s’accélère pour que les gens dansent un par un en forme de cercle. Les hommes courent, soulèvent le sable et font des mouvements de lutte en harmonie avec le groupe. Ce qui ressemblerait à une émeute chez nous est ici un équilibre de respect et d’énergie sous forme de danse. Très impressionnant à regarder.

Notre mission prend déjà fin. Nous pouvons affirmer que le choc culturel a été important, surtout à partir de la 2e semaine. Les conditions de vie sont déroutantes dans les villages, pourtant les sourires se lisent sur tous les visages. Nous sentons que nous pouvons définitivement apporter une aide dans ces villages plus reculés. Nous avons aimé notre mission, car elle nous a permis de nous rapprocher de l’essentiel, soit l’humain. Il y a tant à offrir et à recevoir. Le Sénégal est le pays de la Terranga, soit le pays de l’hospitalité. Nous n’avions pas d’attentes et nous avons reçu les plus beaux cadeaux de Noël ; l’amour et la gratitude.

Afrique, on est déjà nostalgique. On te dit à bientôt.