Nos chauffeurs d’Haïti témoignent
Alors qu’Haïti est confronté à une grave crise socio-économique, nos chauffeurs constituent des éléments clé indispensables au succès de nos activités.
Ronald Vilsaint
Je travaille à Terre Sans Frontières comme chauffeur depuis plus de 8 ans et photographe depuis 2 ans. Avant Terre Sans Frontières, J’ai travaillé dans plusieurs institutions privées mais lors d’un recrutement j’ai tenté ma chance lorsqu’un ami m’a parlé des conditions de travail et m’a conseillé de postuler.
Sur le plan professionnel, Terre Sans Frontières me donne la possibilité d’agrandir mes expériences, de comprendre qui je suis réellement parce qu’on me fait confiance et me permet également de me faire de nouveaux amis.
Sur le plan personnel, il me permet d’appliquer le dicton « quand on travaille on te respecte ». J’ai ainsi trouvé le respect auprès de mes amis et tous les gens que je fréquente. En second lieu, il me garantit l’autonomie financière qui m’aide à répondre à mes besoins, aider ma famille et mes amis nécessiteux.
Mon plus gros défi est typiquement lié à l’insécurité du pays. Je prends la situation de Martissant comme exemple, où on ne peut passer depuis plusieurs mois puisque des bandits armés ont mis une barrière entre le grand sud et le département de l’ouest.
Ce qui me rend si fier dans l’accomplissement de mon travail est la relation humaine qui existe entre nous. Celle-ci est très enrichissante que ce soit avec les employés administratifs et les jeunes boursiers qui sont avec nous sur le site. Je ne considère pas mon travail uniquement comme consistant à les transporter à l’école, il y a des moments où je me sens très heureux de leur apporter écoute, compréhension et sécurité. Je me permets d’ajouter la conviction d’être utile et la confiance que mes collègues ont en moi, qui renforcent mes sentiments et ma passion pour ce travail.
Une journée est réussie pour moi quand j’ai pu respecter le timing journalier du bureau. Sortir et répondre à mes attributions sans embuches.
Malgré la situation de mon pays, je reste toujours fort pour ne jamais me sentir découragé et comprendre la chance que j’ai de pouvoir exercer un métier qui me plaît.
Je me sens très très utile, vu qu’on a toujours un travail à faire, transporter les jeunes, récupérer quelqu’un ou un colis, partir en mission pour une distribution quelconque.
Pour exercer ce métier la personne devrait avoir un bon contrôle de soi, de l’expérience et de la patience.
Je fais une différence car parmi tous les jeunes qui laissent le pays, moi je suis toujours là, à le servir. De concert avec TSF, j’aide les gens de mon pays et personnellement ma famille et mes amis.
Anecdote
Une employée administrative a eu un malaise en pleine nuit. Il était minuit quand elle m’a appelé pour me demander de lui apporter secours parce qu’elle ne pouvait pas résister à un mal au ventre. Du coup, j’ai appelé Walens, un collègue chauffeur, pour qu’il m’accompagne pour récupérer l’employée malade et l’emmener vite fait dans un hôpital de la capitale malgré l’insécurité qui régnait encore à cette époque. Un fois à l’hôpital les médecins ont dû procéder à une intervention chirurgicale sinon ça pouvait se compliquer et même causer la mort de cette dernière. Ce jour-là je me sentais très fier de moi-même et j’ai prié Dieu pour qu’il me donne toujours la chance pour pouvoir aider mes semblables.
Je me rappelle aussi qu’à une autre occasion, nous étions à Jérémie et qu’il fallait traverser un pont. Mais l’eau de la rivière coulait si fort, qu’elle débordait dans les rues et ce n’est qu’avec l’aide de la population que nous avons pu passer.
Walens Lindor
Je travaille comme chauffeur à Terre Sans Frontières depuis maintenant 8 mois. J’ai grandi dans la localité de Vialet avec ma mère dans des conditions pas du tout faciles mais j’ai pu boucler mes études classiques. N’ayant pas les moyens financiers, je ne pouvais faire des études universitaires.
Heureusement que j’ai pu trouver un ami qui, après m’avoir au préalable appris à conduire un camion, m’a aidé à entrer dans une auto-école pour que je puisse passer un test et obtenir légalement mon permis de conduire. Ce qui fait que lorsque Terre Sans Frontières avait un poste de travail comme chauffeur, je pouvais postuler.
Sur le plan professionnel, je suis très content d’être un chauffeur à Terre Sans Frontières, il me donne la possibilité de mettre en valeur mes compétences. Sur le plan personnel, Terre Sans Frontières me rend indépendant financièrement.
La plus grande difficulté que je puisse rencontrer dans mon boulot, c’est quand j’ai un travail extrêmement important à faire et puis en sortant, les routes sont bloquées. Je ne peux pas remplir ma tâche et suis obligé de faire demi-tour. Et des heures de temps passent sans que je ne puisse exécuter le travail qui m’a été confié. C’est ce qui me dérange particulièrement.
Je suis très fier d’être un salarié dans un pays comme le nôtre, je sais qu’il y a beaucoup de jeune qui voudrait avoir cette possibilité.
Une journée n’est réussie pour moi lorsque : je gagne mon poste de travail et accomplis toutes mes tâches. Qu’au moment de la pause je puisse rencontrer tous mes collègues. Qu’ensemble, on partage un bon repas, à boire…Pour ensuite, reprendre le travail et qu’au moment d’être relâché, qu’on puisse chacun rentrer chez soi. Qu’en arrivant, je puisse voir que tout va bien chez moi, mon entourage, la communauté, que je ne reçoive aucune mauvaise nouvelle. Que tout le monde va bien. Ainsi la journée est réussie.
Des fois, il m’arrive d’être découragé, dans la mesure où les choses peuvent être difficiles. Surtout au niveau de la route. En sortant, on peut se retrouver bloqué. Ne pouvant atteindre la destination fixée, on est obligé de rebrousser chemin. Puis, il peut arriver qu’on ait autre chose à régler à la capitale et qu’on se trouve dans l’incapacité de le faire…ce qui peut me décourager.
Je me sens utile par rapport à mon boulot, Je suis toujours disponible et je fais en sorte d’être toujours sur place sur le site de sorte que si une urgence se présente je puisse aider à la gérer. Je suis toujours là et disponible non seulement pour conduire mais aussi au cas où il y aurait un autre travail à faire et que ma présence pourrait être utile.
Pour qu’une personne soit à la hauteur pour exercer ce métier, il faut qu’elle ait la capacité, la compétence et le respect du code de la route.
Mon rêve c’est de continuer à travailler à Terre Sans Frontières afin de toujours aider les gens de la communauté.
Maurice James Adelson
Je travaille à Terre Sans Frontières depuis 4 ans en tant que chauffeur et je suis également le responsable des véhicules. Sur le plan professionnel, j’acquiers plus de capacité et plus de compétences. Je me sens très utile à l’institution que j’aime beaucoup et me rend toujours disponible quand c’est nécessaire, spécialement les jours fériés et aussi le week-end.
Je vis avec ma femme et ma fille mais à cause du travail on ne vit pas dans la même maison. Ma femme et ma fille vivent au plateau central et moi, à Petit-Gôave. Il m’arrive d’être un peu découragé de ne pouvoir voir les membres de ma famille après un mois passé sur le site. Toutefois, je poursuis mon travail et me sens utile auprès de toute l’équipe.
Pour moi, une journée est réussie c’est quand j’avais quelque chose à faire durant la journée et que j’aie pu l’accomplir. Mon plus grand problème c’est de tomber sur des barricades routières qui m’obligent à faire demi-tour sans atteindre mon objectif et me mettent en retard dans mes activités quotidiennes.
Les qualités nécessaires pour bien exercer ce métier sont la discipline et le sens de collaboration.
Je sens que je fais une différence dans mon pays parce que j’aide et paie les frais de scolarité pour environ 5 enfants qui ne sont pas de ma famille.
Anecdote
Une fois, j’étais à Jérémie accompagné de l’Ingénieur qui devrait superviser un chantier. Arrivés à mi-chemin sur la route principale que nous avions l’habitude de fréquenter, on a trouvé un fossé au milieu de la route, creusé par des individus qui habitent la zone. Ils nous observaient, pensant que nous n’allions pas pouvoir traverser. Mais j’ai utilisé des techniques qui m’ont permis de le traverser. Cependant, à notre retour, on a trouvé le fossé beaucoup plus profond et plus large qu’avant. Pour passer, nous avons été obligés de donner de l’argent à ces individus afin qu’ils puissent combler le fossé pour faciliter notre passage.